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Chapelle Saint-Grégoire-le-Grand

Quatre cardinaux interpellent le pape à propos d'Amoris laetitia

21 Novembre 2016 , Rédigé par Chapelle Saint Grégoire-le-Grand

Quatre cardinaux interpellent le pape à propos d'Amoris laetitia

Rome, le 16 novembre 2016. Quatre cardinaux rendent publique une lettre à propos des ambiguïtés

 d'Amoris Laetitia, qu'ils ont écrite au pape... lequel ne leur a pas répondu.

Un vaticaniste résume ainsi leur pensée :

"on ne peut pas continuer à faire comme si c'était le cardinal Kasper qui était en cause.

Il y a un seul responsable".

 

Les quatre cardinaux [voir photo ci-dessus] - Raymond L. Burke, Walter Brandmuller, Carlo Caffara

et Joachim Meisner- ont formellement exprimé au pape François cinq "Dubia" (doutes), concernant à la fois

la question très débattue de la communion pour les divorcés remariés, et surtout la valeur des normes morales

qui concerne précisément la conception de la vie chrétienne.

 

Les "Dubia" ont été envoyés au pape il y a deux mois - le 19 septembre 2016 - mais comme il n'y a pas de

réponse, ce document exceptionnel est rendu public afin que la réflexion sur les questions soulevées puisse

se poursuivre. L'enjeu, c'est tout l'édifice de la morale catholique.

 

Les quatre cardinaux qui ont signé cette lettre et la publient maintenant ne font pas partie du groupe de ceux qui,

il y a un an, au début de la seconde session du synode consacré à la famille, avaient remis à François la fameuse

lettre "des treize cardinaux" .


La Porte Latine du 18 novembre 2016

 

1 - Un préalable nécessaire

 

L’envoi de la lettre qui suit au Pape François des quatre cardinaux que nous sommes a pour origine une profonde

préoccupation pastorale.

Nous avons constaté, chez beaucoup de fidèles, un grave désarroi et une grande confusion à propos de

questions très importantes pour la vie de l’Église. Nous avons remarqué que même au sein du collège épiscopal sont

données des interprétations contradictoires du chapitre VIII d’"Amoris lætitia".

 

La grande Tradition de l’Église nous enseigne que le moyen de sortir de situations comme celle-ci est d’avoir

recours au Saint-Père, en demandant au Siège Apostolique de résoudre ces doutes qui sont à l’origine du

désarroi et de la confusion.

 

Notre geste est donc un acte de justice et de charité.

 

- De justice : en prenant cette initiative, nous professons que le ministère pétrinien est le ministère de l’unité et

que c’est à Pierre, c’est-à-dire au Pape, qu’incombe le service qui consiste à confirmer dans la foi.

 

- De charité : nous voulons aider le Pape à prévenir des divisions et des oppositions au sein de

l’Église, en lui demandant de dissiper toute ambigüité.

 

Nous avons également rempli un devoir précis. D’après le Code de droit canonique (canon 349),

la mission d’aider le Pape dans le gouvernement de l’Église universelle est confiée aux cardinaux, y compris

lorsqu’ils agissent individuellement.

 

Le Saint-Père a décidé de ne pas répondre. Nous avons interprété cette décision souveraine qu’il a prise comme

une invitation à continuer cette réflexion et cette discussion calme et respectueuse.

 

Et par conséquent nous informons de notre initiative tout le peuple de Dieu, en lui proposant

toute la documentation.

 

Nous voulons espérer que personne n’interprétera cette démarche en fonction du schéma

“progressistes-conservateurs”, ce qui serait complètement erroné. Nous sommes profondément soucieux du

véritable bien des âmes, qui est la loi suprême de l’Église, et non pas de faire progresser au sein de l’Église

une quelconque forme de politique.

 

Nous voulons espérer que personne ne nous considérera injustement comme des adversaires du Saint-Père

ni comme des hommes dépourvus de miséricorde. Ce que nous avons fait et que nous sommes en train de faire

est inspiré par la profonde affection collégiale qui nous unit au Pape et par notre souci passionné du bien des fidèles.

Card. Walter Brandmüller
Card. Raymond L. Burke
Card. Carlo Caffarra
Card. Joachim Meisner

 

2 - La lettre des quatre cardinaux au pape

A notre Saint-Père, le Pape François

Et, pour information, à Son Éminence le Cardinal Gerhard L. Müller

Très Saint Père,

À la suite de la publication de Votre Exhortation Apostolique "Amoris lætitia", des théologiens et

des chercheurs ont proposé des interprétations non seulement divergentes, mais même contradictoires,

surtout en ce qui concerne le chapitre VIII. De plus, les médias ont monté en épingle cette

polémique, provoquant ainsi de l’incertitude, de la confusion et du désarroi chez un grand nombre de

fidèles.

En conséquence, de très nombreuses questions relatives à la juste interprétation à donner au chapitre

VIII de l’Exhortation ont été adressées à nous, soussignés, mais aussi à beaucoup d’Évêques et de

Prêtres, par des fidèles appartenant à toutes catégories sociales.

Aujourd’hui, poussés en conscience par notre responsabilité pastorale et désirant concrétiser de plus

en plus cette synodalité à laquelle Votre Sainteté nous exhorte, nous nous permettons, avec un profond

respect, de Vous demander, Très Saint Père, en tant que Maître suprême de la foi appelé par le

Christ Ressuscité à confirmer ses frères dans la foi, de résoudre les incertitudes et de faire la lumière,

en ayant la bonté de répondre aux "Dubia" que nous nous permettons de joindre à la présente lettre.

Que Votre Sainteté veuille bien nous bénir, nous qui L’assurons de toujours l’inclure dans nos prières.

Card. Walter Brandmüller
Card. Raymond L. Burke
Card. Carlo Caffarra
Card. Joachim Meisner

Rome, le 19 septembre 2016

 

3 - Les "Dubia"

1.  Il est demandé si, en conséquence de ce qui est affirmé dans "Amoris lætitia" aux nn. 300-305,

il est maintenant devenu possible d’absoudre dans le sacrement de Pénitence et donc d’admettre à la

Sainte Eucharistie une personne qui, étant liée par un lien matrimonial valide, vit "more uxorio" avec

une autre personne, sans que soient remplies les conditions prévues par "Familiaris consortio" au

n. 84 et réaffirmées ensuite par "Reconciliatio et pænitentia" au n. 34 et par "Sacramentum caritatis"

au n. 29. L’expression "dans certains cas" de la note 351 (n. 305) de l’exhortation "Amoris lætitia"

peut-elle être appliquée aux divorcés remariés qui continuent à vivre "more uxorio" ?

2. Après l’exhortation post-synodale "Amoris lætitia" (cf. n. 304), l’enseignement de l’encyclique de

Saint Jean-Paul II "Veritatis splendor" n. 79, fondé sur la Sainte Écriture et sur la Tradition de

l’Église, à propos de l’existence de normes morales absolues, obligatoires sans exception, qui

interdisent des actes intrinsèquement mauvais, continue-t-il à être valide ?

3. Après "Amoris lætitia" n. 301, est-il encore possible d’affirmer qu’une personne qui vit

habituellement en contradiction avec un commandement de la loi de Dieu, comme par exemple celui qui

interdit l’adultère (cf. Mt 19, 3-9), se trouve dans une situation objective de péché grave habituel

(cf. Conseil pontifical pour les textes législatifs, Déclaration du 24 juin 2000) ?

4. Après les affirmations contenues dans "Amoris lætitia" n. 302 à propos des "circonstances qui

atténuent la responsabilité morale", faut-il encore considérer comme valide l’enseignement de

l’encyclique de Saint Jean-Paul II "Veritatis splendor" n. 81, fondé sur la Sainte Écriture et sur la

Tradition de l’Église, selon lequel "les circonstances ou les intentions ne pourront jamais transformer

un acte intrinsèquement malhonnête de par son objet en un acte subjectivement honnête ou défendable

comme choix" ?

5. Après "Amoris lætitia" n. 303, faut-il considérer comme encore valide l’enseignement de l’encyclique de

Saint Jean-Paul II "Veritatis splendor" n. 56, fondé sur la Sainte Écriture et sur la Tradition de l’Église,

qui exclut une interprétation créatrive du rôle de la conscience et affirme que la conscience n’est

jamais autorisée à légitimer des exceptions aux normes morales absolues qui interdisent

des actes intrinsèquement mauvais de par leur objet ?

 

4 - Note explicative par les quatre cardinaux

LE CONTEXTE

Les "dubia" (mot latin signifiant : "doutes") sont des questions formelles posées au Pape et à la

Congrégation pour la Doctrine de la Foi et qui demandent des éclaircissements à propos de sujets

particuliers concernant la doctrine ou la pratique.

La particularité de ces questions est qu’elles sont formulées de telle sorte qu’elles demandent comme

réponse un "oui" ou un "non", sans argumentation théologique. Cette manière de s'adresser

au Siège Apostolique n’est pas une invention de notre part ; c’est une pratique séculaire.

Venons-en à l’enjeu concret.

La publication de l’exhortation apostolique post-synodale "Amoris lætitia", consacrée à l’amour dans la

famille, a fait naître un vaste débat, notamment en ce qui concerne le chapitre VIII. Les paragraphes

300-305, en particulier, ont fait l’objet d’interprétations divergentes.

Pour beaucoup de personnes – des évêques, des prêtres de paroisse, des fidèles –

ces paragraphes font allusion ou même enseignent de manière explicite un changement dans la

discipline de l’Église en ce qui concerne les divorcés qui vivent une nouvelle union, tandis

que d’autres personnes, qui admettent le manque de clarté ou même l’ambigüité des passages en

question, expliquent néanmoins que ces mêmes pages peuvent être lues en continuité avec

le magistère précédent et qu’elles ne contiennent pas de modification dans la pratique et dans

l’enseignement de l’Église

Animés par une préoccupation pastorale à l’égard des fidèles, quatre cardinaux ont adressé

au Saint-Père une lettre sous forme de "dubia", dans l’espoir de recevoir des éclaircissements,

étant donné que le doute et l’incertitude sont toujours hautement dommageables à la pastorale.

Le fait que les personnes qui interprètent l’exhortation parviennent à des conclusions différentes

est également dû à des manières divergentes de comprendre la vie chrétienne. En ce sens,

ce qui est en jeu dans "Amoris lætitia", ce n’est pas seulement la question de savoir

si les divorcés qui ont contracté une nouvelle union – dans certaines circonstances –

peuvent ou non avoir de nouveau accès aux sacrements.

On constate enfin que les interprétations du document reposent aussi des approches différentes,

contradictoires, du mode de vie chrétien.

Ainsi, alors que la première question concerne un sujet concret concernant les divorcés remariés civilement,

les quatre autres questions concernent des sujets fondamentaux de la vie chrétienne.

 

 

Sources : Nuova Bussola/benoit-et-moi/chiesa.espresso.repubblica/La Porte Latine du 18 novembre 2016

 

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